« Il n’y a point de mal dont il ne naisse un bien » - Voltaire
Ce pourrait être la conclusion de ce post.
20 mai 2020, je craque, assise derrière mon bureau avec le psy au téléphone qui me demande d’aller consulter le médecin de peur que je fasse une bêtise.
Epuisement professionnel … ou « burn out », pour faire mieux. Ca paraît moins grave quand on le dit en anglais. Et puis, on n’assume pas de dire qu’on souffre d’épuisement professionnel. Comme si cela n’arrivait qu’aux personnes faibles qui n’ont pas les épaules assez larges pour assumer les responsabilités qui leur incombent.
C’est pourtant ce qui s’est passé en mai 2020. J’ai craqué. Beaucoup de pression de la part de mon supérieur. Une vie personnelle chargée. Puis, cerise sur le gâteau (et comme si cela ne suffisait pas), un confinement durant lequel il a fallu que je gère les deux.
J’aurais dû écouter mon corps qui m’avait pourtant lancé des signaux très clairs : douleurs gastro-intestinales (2 soirées aux urgences, 2 semaines d’arrêt de travail, une coloscopie), dos bloqué (souffrances pendant plusieurs mois et une semaine d’arrêt de travail quelques jours avant de craquer), perte de motivation, boule (que dis-je, énorme boulet) au ventre en allant travailler et, cerise sur le gâteau, l’idée qui s’est insinuée petit à petit que si j’avais un accident de voiture sur le trajet du travail, cette souffrance s’arrêterait et que tout le monde comprendrait ma souffrance.
Je n’en suis, fort heureusement, pas arrivée là. Mais après une vacherie supplémentaire de mon supérieur je n’y suis plus arrivée. Le 20 mai 2020, je suis allée travailler en pleurant pour le troisisème jour consécutif. A 8 heures j’étais à mon bureau. A 10h30, le psychologue du travail m’a envoyée chez le médecin et depuis je n’ai pas remis les pieds au bureau ni même dans la ville dans laquelle je travaillais.
Alors, j’ai pleuré. Beaucoup.
Ma famille m’a beaucoup soutenue. Mon mari et mes filles sont mes piliers.
Ma psychologue m’a permis de m’apaiser.
Et puis le mois de septembre est arrivé. Nouvelle année scolaire. Nouveau cycle pour tout le monde. Moi, j’allais encore plus mal. Aucune perspective. La culpabilité de plus en plus tenace d’avoir abandonné mes personnels, leur avoir laissé ma charge de travail et les avoir laissés seuls face à une hiérarchie malsaine. La peur que mon arrêt de travail ne soit pas prolongé. Les angoisses chaque mois qui remontaient avant mon rendez-vous chez mon médecin. La peur de devoir reprendre le travail. Les idées noires qui revenaient.
Et puis, enfin, l’avis de la psychiatre du travail qui me place en arrêt longue maladie. Ma pathologie est reconnue. Le soulagement.
Mais toujours aucune perspective …
J’étais à cette période là en pleine reconversion professionnelle. Je souhaitais quitter une formation
qui m’imposait une mobilité géographique nationale tous les 5 ans pour une administration plus
stable. Je désirais tout de même avoir tout autant, sinon plus de responsabilités. J’aimais ce que je faisais, j’aimais manager, j’aimais gérer l’urgence et devoir être sur tous les fronts. Mais vous
imaginez bien qu’il est compliqué pour se lancer dans une nouvelle voie avec de grosses
responsabilités quand vous vous sentez brisée, inutile et que votre contexte professionnel vous a
poussé à avoir des idées noires …
Et puis, une idée trottait dans ma tête depuis des années. Un projet pour mes vieux jours. Quand
mes filles seraient grandes. Quand le crédit de la maison serait remboursé. Jusque là je voulais
assurer une pleine stabilité financière pour la famille et la sécurité de l’emploi. Comme si cela
suffisait à notre bonheur …
Ce projet commençait à devenir une évidence. Je voulais revenir à mes racines, à mes valeurs, à ma
terre. Alors je suis allée me promener dans les Alpilles, dans mes oliviers. J’ai soufflé un bon coup. Ma
décision était prise : j’allais ouvrir une jardinerie dans mon village !
Mais attention, pas n’importe quelle jardinerie. Je veux du circuit court, du bio, de l’éco jardinage, de
l’artisanat local, de l’insertion, de la formation pour les enfants. Bref, je veux ouvrir un magasin qui
ait du sens pour tous.